Finissage d' "Evelyne Axell-Méthodes Pop", au "Delta", à Namur

écrit par YvesCalbert
le 24/01/2020
Couverture du Catalogue : "Sans Titre"/1964/collage/Coll. Philippe Axell

Ce dimanche 26 janvier, entre 16h et 18h, finissage de l’exposition « Evelyne Axell – Méthodes Pop », avec petites visites érotiques de 20 minutes (à partir de 18 ans), un parcours conté, proposé par les conteurs Philippe Noël et Amandine Orban. Prix d’accès à cette animation : 5€.

A noter que les enfants ne seront pas oubliés grâce à des animations réalisées en collaboration avec la « Maison du Conte », dès ce samedi 25, à 16h.

Ayant étudié la peinture à l’huile aux côtés de René Magritte (1898-1967), après avoir suivi des cours de Céramique de l’« Académie des Beaux-Arts », à Namur, puis d’Art dramatique, au « Conservatoire royal », à Bruxelles, l’artiste namuroise Evelyne Axell (née Evelyne Devaux/1935-1972) nous préente ses oeuvres, de ses collages à ses créations sur plexiglass, grâce au Service de la Culture de la Province de Namur.

Influencée par des artistes new-yorkais des années ’60, tels Jim Dine, Marisol (née Maria Sol Escobar/1930-2016) et Andy Warhol (né Andrew Warhola/ 1928-1987), en 1969, elle est la première femme artiste à recevoir le « Prix de la Jeune Peinture belge », Evelyne Axell étant reconnue, aujourd’hui, dans le monde, comme l’une des principales artistes du « Pop Art ».

A souligner la présence, exposées pour la 1ère fois, grâce à la précieuse collaboration de Philippe Axell – le fils de l’artiste, bien trop tôt disparue, victime d’un accident de la route – des dix-sept premiers collages qu’elle réalisa, en 1964, avec des découpages de magazines féminins et de revues érotiques. Ainsi, nous découvrons une oeuvre « sans titre » qui fut choisie pour l’affiche de la présente exposition, ou, encore, son collage « Marie- Claire », au sein duquel elle intègre, la couverture de l’édition belge de « Marie-Claire », présentant l’une de ses photographies, alors qu’elle était speakrine à la « RTB » (sans « F », à l’époque), avant d’entamer ses 8 années de crarrière artistique.

Ses sujets de prédilection, outre la femme, étant l’automobile, synonyme d’émancipation de la femme, dont les pieds peuvent librement pousser sur l’accélérateur, comme le démontre l’une de ses oeuvres, « Axell-Eration » (le talon se détachant de la chaussure pouvant être interprêté comme une érotisation de sa création) ; la conquête spaciale, sujet important dans les années ’70, dont sa « Grande Sortie dans l’Espace » (123 x 303 cm) ; ou les événements de Mai ’68, dont « Le joli Mois de Mai » (200 x 350 cm), dont la partie centrale peut nous faire penser au « Déjeuner sur l’Herbe » (1862-1863), d’Edouard Manet (1832-1883) ; ce qui ne l’empêcha pas de traiter d’autres sujets, déjà d’actualité à l’époque, comme celui d’une fusillade, au sein d’une Université américaine, la « Kent State University », intitulé…« Campus », dont le visage féminin, à l’avant plan, a été, sans doute, inspiré par « Le Cri » (1893), d’Edvard Munch (1863-1944).

Afin d’illustrer l’influence qu’eurent sur elle plusieurs artistes du Pop Art, soulignons, aussi, la présence de quelques oeuvres de Derek Boshier, Pauline Boty, Antony Donaldson, Martial Raysse, Andy Warhol, …

Sous vitres, sont exposées, pour la première fois, des photos et croquis d’elle même, dénudée, parfois dans des postures érotiques, qui lui servirent pour réaliser ses nus féministes, qui sont, donc, pour la plupart, des reproductions de son propre corps.

Un étage plus bas, une deuxième salle nous permet, entre autres créations, de découvrir un projet qu’elle n’eut pas le temps de concrétiser – étant décédée à 37 ans, victime d’un accident de la route -, son « Musée archéologique du XXe siècle. Département : Age du Plastique », réalisé, ici, à Namur, pour la première fois, selon un plan qu’elle imagina, ce dernier étant exposé dans une vitrine, avec cette anotation, rédigée de sa main : « Résultat des fouilles, entreprises dans le ‘tumulus d’Axell’ (nord-ouest du continent asiatique, dans la région autrefois appelée Europe« )…

… Dans ce dernier espace dédié à l’utopie du tout plastique, nous découvrons des objets en plastique, prêtés par des employés provinciaux, d’une salière « Tupperware » à un transistor, radio typique de son époque, la lampe de chevet exposée ayant appartenu à l’artiste namuroise.

Plus surprenante, sa propre momie plastifiée, créée selon son projet, planifié deux ans avant son décès, avec ses bijoux, chaussures, vêtements…, nous est présentée, surmontée d’un couvercle en plexiglass.

Côté peintures, nous admirons « Le Peintre » (1970), prêtée par l’ « ADAM Design Museum », présenté entre deux copies, réalisées en 2019. A l’autre extrémité de cette petite salle, derrière une tenture, un cabinet érotique, dévoilant ses visions de l’ « Origine du Monde », clin d’oeil Pop Art à la célèbre peinture de Gustave Courbet (1819-1877), la particularité des oeuvres d’Evelyne Axell étant de présenter, outre l’émail sur le plexiglass, de la fourure synthétique.

Sur le plan littéraire, un extrait de « Mythologies » (1957) est repris sur un mur de cette section de l’exposition, dû à Roland Berthès (1915-1980) : « Le plastique est tout entier englouti dans son usage : à la limite, on inventera des objets pour le plaisir d’en user. La hiérarchie des substances est abolie, une seule les remplace toutes : le monde entier peut être plastifié, et la vie elle-même, puisque, paraît-il, on commence à fabriquer des aortes en plastique », un propos qui est à replacer dans une époque révolue, il y a… 63 ans…

… De son côté, Evelyne Axell, dans sa lettre à Gérald Gassiot, en date du 05 octobre 1970, écrivait : « J’ai un projet de ‘Musée archéologique du 20è siècle (Age du Plasique)’, où je montrerais aux visiteurs du futur que cette matière s’est introduite dans notre vie sous les formes et pour les fonctions les plus variées ».

Lisons, aussi, ce qu’écrivait le Dr. Flavia Frigeri, dans « Evelyne Axell et l’Age du Plastique », extrait du catalogue :« Le plastique représentait aux yeux d’Axell la substance la plus à même d’exprimer son époque pour les générations futures. En réalité, le projet pour un ‘Musée archéologique du XXe siècle’. Département : âge du plastique’, se voulait à la fois un hommage au présent et une capsule-témoin pour le futur. La dimension ‘archéologique’ du projet (rendue manifeste par son titre même), laissait deviner l’ambition anthropologique de l’environnement, soit présenter les résidus d’une civilisation perdue, exaltée par le plastique. »

Dans ce même catalogue, relevons le propos de son fils, Phillipe Axell: « Depuis son enfance, Evelyne ne cesse de des­siner. Son mari (Jean Antoine/1930-2016/l’un des pioniers de la télévision belge/ndlr) réalise des films sur les artistes qu’elle rencontre. C’est là qu’elle découvre sa voie. Toutefois, il lui manque une bonne for­mation de peintre. Son beau-père, Georges Antoine, est un ami de René Magritte. Il per­suade le maître de prendre sa belle-fille sous son aile. Evelyne bénéficie donc d’un appren­tissage régulier auprès de celui-ci qui, après un an, lui écrit : ‘Oui, allez-y !’ … »

Issu de sa série « Métamorphoses », nous pouvons assister, dans l’une des salles de l’exposition, à la projection du film de Jean Antoine, « Dieu est-il
Pop ? » (Bel./ »RTB »/1964/43’28″/lauréat, en 1965, du « Prix CIDALC », au « Festival international de Télévision de Monté-Carlo »), avec la voix de son épouse, Evelyne Axell, un film est une voix que nous pouvons retrouver sur internet, grâce aux archives audiovisuelles de la « Sonuma », sous le lien : https://www.sonuma.be/archive/metamorphoses-du-17111964.

A noter, enfin, le propos d'Evelyne Axell : « Malgré toute l’agressivité, mon univers est avant tout rempli d’un amour inconditionnel de la vie. mon propos est clair : la nudité et la féminité expriment l’utopie d’une liberté bio-botanique, c’est à dire, une liberté sans frustration ni soumission progressive, qui tolère uniquement les limites qu’elle se fixe… J’ai envie de produire librement des images traduisant la passion sous toutesses formes et, simultanément, si brillantes qu’elles aiguisent l’appétit des masses. »

Dans l’attente du Finissage, ouverture de l’Exposition : du mardi au vendredi, de 11h à 18h, samedi et dimanche, de 10h à 18h. Prix d’entrée : 10€ (5€ et 3€, pour les détenteurs du « Pass Delta » et les membres d’un groupe de minimum 10 personnes / 0€, pour les moins de 12 ans, les « Art. 27 ». Guide du Visiteur : offert (broché/20p./en anglais, néerlandais ou français). Catalogue : Ed. « Skira-Le Delta-Province de Namur »/ bilingue anglais-français/cartonné/136 p./35€.

A souligner l’organisation, ces samedi 25 et dimanche 26, de différentes animations contées, en collaboration avec « La Maison du Conte » (détails sur : https://www.ledelta.be/evenements/) :

*** ce samedi 25 :
- 16h00 : « Vives et vaillantes », avec la conteuse française Praline Gay-Para : les jeunes filles, dans les contes, n’attendent pas qu’un prince vienne les sauver en les épousant, …
- 17h30 : Rencontre conviviale, avec la « Maison du Conte ».
- 18h30 : « Femme du Nord et Cuberdon » (à partir de 13 ans), avec la conteuse Sophie Clerfayt : Portraits de femmes qui aiment la vie, les hommes et la liberté…

*** ce dimanche 26 :
- 10h et 11h :« Au Fond des Bois » (de 6mois à 4 ans), spectacle interacif musical, avec la conteuse française Léa Pellarin et ses livres-tissus.
- 15h00 : « Les Souliers rouges », tragi-comédie pour petite fille et marâtre, par les compagnies française « Les Nuits claires » et belge :« Agnello ».
- 18h30 : « Bocca al Lupo » (à partir de 14 ans), une version féroce et revisitée du célèbre conte de « Chaperon rouge », avec la conteuse Italia Gaeta et le musicien Gilles Ghéraille.

Ailleurs, à Namur :

Notons qu’à proximité du « Delta », à hauteur de l’ « Ecole des Beaux-Arts », où elle vécut une partie de ses études, une fresque, en hommage à cette artiste namuroise, a été réalisée, aux frais de la Ville de Namur, par Ania Zuber et Manuel Gonzalez Bustos, Maxime Prévot, le Bourgmestre de Namur, ayant déclaré : « Il fallait faire quelque chose afin qu’Evelyne Axell ne soit pas connue des seuls amoureux de l’art, mais de tous les Namurois. »

Côté provincial, le « Delta » nous propose, aussi, d’autres découvertes :

*** « This is my Body (…) », jusqu’au dimanche 19 avril (salle du « 7è Ciel ») : « Partant du principe que le corps et le langage partagent les mêmes conventions sociales, théoricien·ne·s et artistes tentent de déconstruire l’histoire des identités et la vision patriarcale et dichotomique du monde, par une insurrection de la pensée et des conduites ». A consulter : https://www.ledelta.be/evenements/this-is-my-body/. Entrée libre.

***« Vies de Meuse » et « #masambreatoi », jusqu’au vendredi 31 janvier (sur le quai de la Sambre), deux expositions réalisées à l’initiative de la« Fédération du Tourisme de la Province de Namur », nous proposant, à l’extérieur, le travail de Xavier Istasse et Catherine Vandenbroucke, nous racontant la Meuse, en mots et en images, d’hier et d’aujourd’hui. Découverte libre.
Prochaine exposition, du samedi 07 mars au dimanche 07 juin : « Peter Saul – Pop, Funk, Bad Painting and More », une première rétrospective, en Belgique, de l’artiste californien Peter Saul (°San Francisco/1934).

Site Web : https://www.ledelta.be/.

Yves Calbert.

  • Couverture du Catalogue : "Sans Titre"/1964/collage/Coll. Philippe Axell
  • Jouxtant la Sambre (c) "Le Delta"/Province de Namur
  • "Ice Cream"/1964/huile sur toile/80 x 70 cm/Coll. privee
  • "Marie-Claire"/1964/l un des 17 premiers collages et huile sur toile/70 x 90 cm/Coll. Philippe Axell
  • "Axell-Eration"/1965/huile sur toile/52,5 x 63,5 cm/Coll. Philippe Axell
  • "Campus"/1970/email sur plexiglas/193 x 128 cm/Coll. P. Axell/"Musee des Beaux-Arts d Ixelles"
  • "Portrait de Joseph Beuys"/1980/102 x 80 cm/Andy Warhol/Coll. Prov. du Hainaut/"BPS22"
  • "Le Peintre"/1970/email sur plexiglas/147 x 51 cm/"ADAM Design Museum"
  • "Petite Fourure verte"/1970/plexiglass et fourrure synthetique/27,3 x 31,4 cm/Coll. privee
  • Evelyne Axell/1972
  • Image extraite du film "Dieu est-il Pop ?" (Jean Antoine/1964/avec les voix d Evelyne Axell et de Rene Magritte)
  • Evelyne Axell et son mari, Jean Antoine, l un des pionniers de la television belge
  • L une des salles du "Delta", consacrees de l exposition "Evelyne Axell, Methodes Pop"
  • Fresque en hommage a Evelyne Axell, a hauteur de l "Ecole des Beaux-Arts" (c) Ville de Namur
  • A gauche, "Tarzan Hurleur" (1972/oeuvre inachevee) (c) "Le Delta" / Photo : Roger Milutin/"Le Soir"
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