Le Fort de Breendonk : mémorial national

écrit par francois.detry
le 31/10/2025
Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )

Le Mémorial national du Fort de Breendonk est un des témoignages les mieux conservés des atrocités nazies commises lors de la Seconde Guerre mondiale.

Une visite captivante raconte l’histoire particulièrement sinistre du SS-Auffanglager Breendonk. Des dortoirs lugubres et des chantiers de travaux forcés à la chambre de torture et le lieu d’exécution : le site respire l’horreur que les prisonniers ont subie sous l’occupation allemande.

Des témoignages, des photos et des montages visuels vous font rencontrer celles et ceux qui ont souffert et qui ont sacrifié leur vie pour notre liberté.

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Le Fort de Breendonk (en néerlandais : Fort van Breendonk, et parfois écrit Fort de Breendonck en français), était une fortification militaire située à Willebroek, dans la province d'Anvers en Belgique.

Construit début du XXe siècle comme un élément du système défensif de la ville d'Anvers (en néerlandais : Antwerpen), le Fort de Breendonk était initialement conçu pour servir de point stratégique dans la défense nationale belge.

Cependant, le Fort de Breendonk fut rapidement dépassé technologiquement à l’aube de la Première Guerre mondiale, et capitula en 1914 face à l’artillerie lourde des Deutsches Heer (en français : Les Armées allemandes) et aux nombreux blessés de la garnison.

Durant la Seconde Guerre mondiale, de septembre 1940 à septembre 1944, le fort fut réquisitionné par les forces d'occupation nazies et transformé en camp de détention et de transit, et placé sous l'autorité de la Schutzstaffel.

Environ 3 600 prisonniers y furent détenus dans des conditions particulièrement inhumaines — principalement des résistants belges, des opposants politiques et des Juifs — parmi lesquels près d'un tiers ne survécurent pas aux sévices qui leur étaient infligés ou furent déportés vers les camps de concentration et centres de mise à mort. Le Fort de Breendonk devint un lieu connu pour sa salle de torture, ses cellules d'isolement et les exécutions sommaires qui s'y déroulaient.

À l'issue de la libération du territoire belge par les forces alliées, le Fort de Breendonk connut une reconversion en lieu d'incarcération pour individus présumés collaborationnistes et, à la cessation de cette fonction de prison pour inciviques, le complexe fut maintenu dans sa configuration d'origine et officiellement institué en tant que lieu de mémoire nationale en 1947.

Il est aujourd’hui l'un des sites mémoriels d'Europe relatifs à la persécution et répression nazie, et offre un témoignage des conditions de détention durant l’Occupation.

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Évolution des défenses d'Anvers

.« Dans le cadre de la « neutralité perpétuelle » imposée à la Belgique par l'Autriche, la Russie, la Prusse, la France et la Grande-Bretagne par le traité de Londres en 1839, ce n'est qu'en 1909 que la Belgique introduit le principe d'une armée nationale ; auparavant, la nation avait misé sur les fortifications. » — Winston Ramsey,

La position fortifiée d'Anvers (en néerlandais : Stelling van Antwerpen) s'inscrit dans un contexte géopolitique tendu de la fin du XIXe siècle. Après son indépendance en 1831, la Belgique doit faire face aux menaces de ses voisins (Pays-Bas, France, Prusse, Royaume-Uni).

Sa neutralité, garantie par le traité des XXIV articles en avril 1839, s'avère insuffisante dans un climat d'expansion militaire européenne.

Le 7 septembre 1859, le gouvernement belge désigne Anvers comme « réduit national » — un ultime bastion défensif où l'armée peut se replier et attendre des secours extérieurs. Ce choix de stratégie s'explique par la proximité de la mer du Nord permettant des communications avec les Britanniques, l'importance économique du port, et la possibilité d'inonder les plaines environnantes pour freiner une avancée ennemie.

Les phases d’évolutions

La défense d'Anvers se développe en trois phases distinctes : une première enceinte (construite de 1859 à 1864) composée de huit forts de 2 à 4 km du centre-ville, une seconde enceinte (construite entre 1878 et 1914) avec 11 forts principaux et 12 redoutes intermédiaires à 15 à 20 km de la ville, et une troisième phase (après 1900) étendant le système défensif vers l'est et le nord-est[note 2].

La construction du fort

Conçu par le général Henri-Alexis Brialmont, le Fort de Breendonk voit sa construction débuter en 1906 pour s'achever en 1913, à la veille de la Première Guerre mondiale. Son coût de 2 millions de francs-or témoigne de son importance dans la seconde ceinture défensive.

Cette fortification présente une structure trapézoïdale en béton armé de 5 hectares, avec des murs atteignant 3,5 mètres d'épaisseur, entourée d'un fossé défensif de 10 mètres de large. Le fort comprend des casemates d'artillerie protégées par des coupoles blindées pivotantes, des quartiers pour 500 hommes et un système autonome d'approvisionnement.

Plusieurs difficultés marquent toutefois sa construction : terrain marécageux nécessitant d'importants travaux de fondation, évolution rapide de l'artillerie rendant certains aspects obsolètes avant même l'achèvement, et contraintes budgétaires limitant certaines spécifications initiales.

Première Guerre mondiale

« Avant le déclenchement officiel de la Première Guerre mondiale, les différentes nations belligérantes avaient déjà préparé leurs plans d’action. Celui de l’Allemagne, surnommé le « plan Schlieffen », prévoit de concentrer la majorité des troupes à l’ouest et de passer par la Belgique, pourtant neutre, afin de déborder l’armée française.

La France, quant à elle, envisage un plan résolument offensif, « le plan XVII », dans le but de ne pas perdre l’initiative. Ce plan prend en compte la possibilité d’une violation de la neutralité belge et organise la concentration de l’armée aux frontières franco-belge et franco-allemande […] » ;— Simon Cools, Belgium Battlefield of Europe, « La Bataille des Frontières (sur le sol belge) (1914) »

Cartographie du plan XVII qui comprend les fortifications belges, notamment la position fortifiée d'Anvers à laquelle appartient le Fort de Breendonk.

À la veille du conflit mondial, la Belgique se trouve dans une position précaire ; la neutralité, garantie par le traité de Londres, est mise à l'épreuve par les ambitions allemandes du plan Schlieffen qui prévoit de contourner les défenses françaises en traversant rapidement le territoire belge.

Dans ce contexte, la position fortifiée d'Anvers représente un des cœurs du système défensif belge, avec ses deux ceintures de fortifications dont le Fort de Breendonk constitue un élément crucial.

Bien qu'achevé un an avant la guerre, le fort est déjà partiellement obsolète face aux développements de l'artillerie lourde, notamment l’artillerie allemande. Le Fort de Breendonk peut résister à des obus de 210 mm, mais il doit faire face aux pièces d'artillerie allemandes de calibres largement supérieurs (tels des obusiers de 305 mm) et de 420 mm (dits les « Grosse Bertha ») capables de percer des structures en béton extrêmement épaisses.

L’invasion allemande

.« Aucun, intérêt stratégique ne justifie la violation du droit. Le Gouvernement belge, en acceptant les propositions qui lui sont notifiées, sacrifierait l'honneur de la nation, en même temps qu'il trahirait ses devoirs vis-à-vis de l'Europe.

Conscient du rôle que la Belgique joue depuis plus de quatre-vingts ans dans la civilisation du monde, Il (note : le roi) se refuse à croire que l'indépendance de la Belgique ne puisse être conservée qu'au prix de la violation de sa neutralité.

Si cet espoir était déçu, le gouvernement belge est fermement décidé à repousser, par tous les moyens en son pouvoir, toute atteinte à son droit. »

Le 4 août 1914, les Deutsches Heer envahissent la Belgique après le refus du Albert Ier d'accorder le passage. L'armée belge, avec 117 000 hommes, oppose une résistance inattendue perturbant le calendrier allemand. Après la chute de Liège puis de Namur, les forces belges se replient sur Anvers, conformément à la stratégie du « réduit national ».

Fin septembre 1914, les forces du général von Beseler entament le siège d'Anvers, dirigeant l'offensive principale contre le secteur sud de la ceinture fortifiée. D'abord épargné, le Fort de Breendonk devient dès le 1er octobre 1914 la cible de l'artillerie allemande et la garnison de 500 hommes du fort se prépare à une résistance acharnée.

Le 2 octobre 1914, les premiers obus de 305 mm et 420 mm s'abattent sur le fort. Malgré l'épaisseur de ses murs, la structure se fissure sous l'impact dévastateur. Les coupoles d'artillerie, particulièrement ciblées, sont progressivement neutralisées. Certains projectiles parviennent à pénétrer jusqu'à 3 mètres de béton armé.

Le 9 octobre 1914, face à l'impossibilité de maintenir une défense efficace, la garnison est obligée de capituler. Cette chute s'inscrit dans l'effondrement général de la ligne défensive sud d'Anvers. Le gouvernement belge et une grande partie de l'armée évacuent la ville vers la côte, tandis que le roi Albert Ier établit une dernière ligne de défense le long de l'Yser.

Les forces allemandes occupent alors le Fort de Breendonk, et utilisent celui-ci comme dépôt de munitions et point d'appui pour le reste du conflit. La garnison est faite prisonnière et envoyée en Allemagne.

  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: Droebeke )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - Les Autorités nazies
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )  - La salle des urnes
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - La salle des urnes
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - La salle des urnes
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - La salle des urnes
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )   - Les corvées
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - La cour des appels
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - les travaux
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - les travaux
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - les travaux
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - les travaux
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - les latrines
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - les dortoirs
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - les dortoirs
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - la salle d'eau
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - les cachots
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - les cachots
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - fin de vie
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - la salle de tortures
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - la salle de tortures
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - lieu d'exécution
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - lieu d'exécution
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - lieu d'exécution
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - lieu d'exécution
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - wagon de transfert vers Auschwitz
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry )
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - mirador de surveillance
  • Le Fort de Breendonk ( photo: F. Detry ) - en mémoire de .....
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