"Le Temps du Sacré" & "Water", à la "Villa Empain", jusqu'au 10 Mars
Jusqu’au dimanche 10 mars inclus, retrouvons-nous à la « Villa Empain », à Ixelles, où la « Fondation Boghossian » nous propose de découvrir deux expositions temporaires :
*** « Water » (rez de chaussée & 1er étage) :
Depuis les temps les plus ancestraux jusqu’à nos jours, l’eau fascine par sa dimension vitale et spirituelle. C’est par l’eau que se noue le lien entre les êtres vivants et le monde.
Suspendue dans le grand hall, nous sommes séduits par une installation, « La Valse des méduses » (2023, in situ), réalisée, in situ, par Christine Marchal (1971) & Céline Pagès (1997), cette dernière ayant écrit, pour le « Carnet du Visiteur » : « Ma pratique relie l’existant pour rendre le visible autrement, offrant de multiples points de vue, de nouveaux chemins entre les éléments. »
La présente exposition « Water » nous propose une réflexion poétique et sensible, autour de l’œuvre de l’artiste sud-coréen Kim Tschang-Yeul (1929-2021), connu pour ses fameuses représentations de gouttes d’eau. Mobilisé durant la guerre de Corée (1950-1953), il assiste, impuissant, à la mort de nombreux camarades soldats. L’acte répétitif consistant à peindre des gouttes d’eau lui servit, en quelque sorte, d’outil thérapeutique, rapprochant son
art du surréalisme et de la spiritualité. Aussi, l’exposition aborde les différentes manifestations de l’eau au travers de nombreuses œuvres contemporaines et installations in situ d’artistes de tous les horizons.
Des oeuvres de trois autres artistes, Patrick Bailly-Maître-Grand, Olafur Eliason et Marion Schutz, sont exposées au rez-de-chaussée, alors qu’à l’extérieur, notre attention est attirée par les « 1312 Flammes sur l’Eau » (2022), créées, in situ, dans la piscine, par Daniel Buren.
Suspendues au mur de l’escalier d’honneur, nous découvrons « 25 Drops », 25 gouttes en verre soufflé, une création de l’artiste verrier américain Jeff Zimmerman.
Comme nous nous trouvons dans une maison de maître, les différentes petites salles portent chacune un nom propre à leurs anciennes fonctions. Ainsi, au premier étage, dans la « chambre nord », nous trouvons « Les poissons des grandes profondeurs ont pied » (2007-2008), une création de l’artiste verrier français Yves Chaudouët , combinant verre soufflé, verre travaillé au chalumeau et verre argenté.
Vient ensuite la « salle d’armes », où sont exposées des oeuvres de Walid Raad, Léon Spilliaert & Bill Viola. Un étroit couloir nous emmène dans la « salle de bain bleue », à la découverte des travaux de Bianca Bondi, Jose Davila & Benoît Pype.
Dans la « chambre d’amis », ce sont des créations d’Asuncion Molinos Gordo, Bao Vuong & Jenny Ymker qui nous sont proposées. Vient la « chambre du baron », avec 25.000 morceaux de briques, récoltées dans la Ville d’Hambourg, suite à un bombardement allié, composent « Altstadt » (2014), une création d’Elizaveta Konovalova, jouxtant « Lire » (1986) & « Valise Bateau » (1982) de Jean-Michel Folon.
Des oeuvres de Geneviève Asse, Olivier Leroi, Benjamin Rossi & Félicien Umbreit nous sont ensuite présentées dans la « salle de bain du baron ». Arrivant dans la « salle de bain de la baronne », nous découvrons des travaux d’Ann Veronica Janssens & Philippe Ramette. Par le « couloir de nuit », décoré de créations de Taysir Batniji & Elias Kurdy, nous arrivons dans la « chambre de la baronne », où nous retrouvons Kim Tschang-Yeul, dont trois oeuvres sont proposées à nos regards, notre visite se terminant dans le « boudoir de la baronne », avec un film, « The man who paints water drops (2020), nous présentant cet artiste sud-coréen, réalisé par son fils Oan Kim, en duo avec Brigitte Bouillot, tentant de nous faire comprendre l’obsession de son père pour la peinture de gouttes d’eau, comme s’il s’agissait de traquer une seule et unique chose qui, se multipliant, se dérobe et s’épuise.
Déployée au sein de l’architecture « Art déco » unique de la « Villa Empain », « Water » propose une multitude de regards inédits d’artistes autour de cette thématique, à la fois intemporelle et universelle. De la goutte d’eau à l’espace infini de l’océan, « Water » explore les états variables de l’eau et la manière dont les artistes s’en emparent , convoquant chacun différentes intentions esthétiques, poétiques, sensorielles ou politiques.
L’exposition présente notamment une sélection d’oeuvres des collections de la « Fondation François Schneider », sise à Wattwilleren, en France , et de la fondation internationale « TBA21 » (« Thyssen-Bornemisza Art Contemporary »), dont le siège est à Madrid, des projets existant à Cordoue et à Venise. Cette première fondation a l’eau comme thématique centrale, questionnant cet élément de manière esthétique, géographique, plastique, poétique, politique ou encore scientifique, la seconde ayant pour but de sensibiliser le public à la question de l’eau et de l’environnement et des océans.
Avec comme intention de restaurer l’intime au cœur de la visite, l’exposition invite le visiteur à la création d'émotions et de souvenirs sensibles, cellulaires.
Catalogue (Ed. « Fondation Boghossian »/2023/103 p.) : 25€, un « Carnet du Visiteur » (22p.) nous étant offert à l’accueil.
*** « Arménie. Le Temps du Sacré » (sous sol) :
La légende, rapportée par les historiens grecs et romains, veut que l’Arménie ait été fondée par un descendant de Noé. Une naissance mythique pour un peuple dont l’histoire est marquée par le sceau de la tragédie, jusque dans l’actualité terrible de notre XXIè siècle. Et pourtant, la fascination reste intacte face au patrimoine architectural et culturel exceptionnel, qui caractérise cette civilisation.
La légende, rapportée par les historiens grecs et romains, veut que l’Arménie ait été fondée par un descendant de Noé. Une naissance mythique pour un peuple dont l’histoire est marquée par le sceau de la tragédie, jusque dans l’actualité terrible de notre XXIè siècle. Et pourtant, la fascination reste intacte face au patrimoine architectural et culturel exceptionnel, qui caractérise cette civilisation.
En partenariat avec « Iconem », des vidéos immersives nous offrent une expérience unique à la découverte de sites historiques en danger, tels que les monastères emblématiques de Arakelots, Geghard, Haghpat, Hayravank, ou Kirants, ainsi que les sites de Deghdznut, Meghri & Surp Hovannes.
Cette exposition – réalisée avec le soutien du « Groupe Wilhelm & Co », d’ « ICONEM« , de la « Fondation Aliph », de « TUMO » & de l’ « UGAB » – présente également des pièces exceptionnelles du « Musée arménien de France », fondé à Paris, en 1953. Ainsi, nous découvrons des manuscrits, miniatures, objets liturgiques précieux, jamais exposés en Belgique, placés en regard d’œuvres d’artistes contemporains, tels que Antoine Agoudjian,(°Saint -Maur-des-Fossés/ 1961), Jean Boghossian (°Alep/1949), Pascal Convert (°Mont-de-Marsant/1957), (°Saint Mekhitar Garabedian (°Alep/1977), Aïda Kazarian (°Ixelles/1952) & « Sarkis » (Sarkis Zabunyan/°Istanbul/1938).
En partenariat avec « Iconem », des vidéos immersives nous offrent une expérience unique à la découverte de sites historiques en danger, tels que les monastères emblématiques de Arakelots, Geghard, Haghpat, Hayravank, ou Kirants, ainsi que les sites de Deghdznut, Meghri & Surp Hovannes.
Si la directrice de la « Fondation Boghossian », Louma Salomé (°Beyrouth/1981), est l’une des commissaires de cette exposition, lisons le propos de son co commissaire, Bernard Coulie (°Bruxelles/1959), docteur en philologie & histoire orientales, à l’ « UCLouvain » (post-doctorats à Harvard & à Vienne) : « Pour les Arméniens, ce qui permet à chacun de nous de dépasser sa nature éphémère et de s’inscrire dans la durée du temps est la mémoire : nous ne disparaissons pas aussi longtemps que quelqu’un se souvient de nous. La mémoire, le souvenir et le rappel maintiennent vivants. La mémoire passe par la parole et par l’écriture, et elles se rejoignent lorsqu’il s’agit de lire à haute voix. Et l’écriture elle-même est sacrée. Selon la tradition, en effet, c’est Dieu lui-même qui inspire à Mesrop Mashtots l’alphabet arménien, comme il avait déjà dicté à Moïse, dans les ‘Tables de la Loi’. Passer par l’écriture revêt alors une dimension sacrée.
« C’est pourquoi les murs des églises arméniennes sont couverts d’inscriptions rappelant les noms des donateurs, des princes et des évêques, qui se lisent sur les pierres tombales et sur les ‘khatchkars’. Celui qui lit ses noms maintient les disparus en vie. C’est pourquoi les copistes des manuscrits arméniens ajoutent souvent, à la fin de leur travail, une note relatant les circonstances dans lesquelles ils ont œuvré ; ils y donnent les noms des rois, des catholicos, des patriarches, et surtout leur nom et ceux des membres de leur famille, et terminent par une formule invitant le lecteur à se souvenir d’eux. »
Vivons donc intensément cette invitation au voyage, dans l’Arménie millénaire, où la réalité virtuelle côtoie vestiges historiques et œuvres contemporaines.
Ouverture des 2 expositions : jusqu’au dimanche 10 mars, du mardi au dimanche, de 11h à 18h. Prix d’entrée : 12€ (10€, pour les membres d’un groupe de minimum 8 personnes) / 8€, pour les étudiants, les enseignants, les personnes à mobilité réduite & les seniors / 4€, pour les étudiants de moins de 26 ans / 0€, pour les moins de 12 ans, les « Art. 27 », sur présentation du « museumPASSmusées » & pour toute personne, le jour de son anniversaire). Contacts : 02.627.52.30 & info@boghossianfoundation.be. Site web : https://villaempain.com/.
A noter :
** Conférence : « 2022-2024 : Où en est la guerre en Ukraine ? », le jeudi 29 février, à 19h, par Michel Goya, auteur, historien, colonel des troupes de marines & Jean Lopez, auteur, directeur de la rédaction du bimestriel « Guerres & Histoire » & rédacteur en chef du « Mook De la Guerre ». Prix d’accès : 15€ (7€, pour les étudiants).
** Visite guidée gratuite : le dimanche 03 mars, sur présentation d’un billet d’entrée.
** « BANAD » (« Brussels Art Nouveau & Art Deco ») : dans le cadre de ce Festival, mettant en valeur le patrimoine Art nouveau & Art déco, en Région de Bruxelles-Capitale, des visites guidées sont organisées, le samedi 09 & le dimanche 10 mars, entre 11h & 15h. Site web : https://www.banad.brussels/.
Lieu culturel incontournable de la vie artistique bruxelloise, la « Villa Empain » est un remarquable témoin de l’architecture « Art déco », édifiée au début des années 1930, sous la conduite de l’architecte Michel Polak (1885-1948), pour le Baron Louis Empain (1908-1976). Sa maison privée devint l’Ambassade de l’URSS, puis le siège de « RTL ». Partiellement détruite et vandalisée, elle fut laissée à l’abandon, au début des années ’80. Vint la « Fondation Boghossian », qui l’acquit en 2006. Après quatre années d’une restauration complexe et minutieuse, menée dans le respect de l’histoire du bâtiment, la « Villa Empain » obtint le « Prix Europa Nostra », attribué par l’ Union Européenne, ce superbe espace muséal est, assurément, à découvrir ou à redécouvrir.
Yves Calbert.