Les Photographies de Yann Arthus-Bertrand exposées à Mons

écrit par YvesCalbert
le 27/08/2020

« Ambassadeur de bonne Volonté pour le Programme des Nations Unies pour l’Environnement », depuis 2009, le bien connu photographe français Yann Arthus-Bertrand Paris/1946), dans le cadre de « L’année UNESCO 2020 », expose ses superbes photographies à Mons, dans la « Salle Saint-Georges », sise sur la Grand’ Place, et dans les « Jardins du Beffoi »jusqu’au dimanche 25 octobredeux expositions organisées par le « Pôle muséal de la Ville de Mons », qui bénéficient du soutien de la « Commission belge francophone et germanophone pour l’UNESCO ».

Prenons d’abord de la hauteur en nous dirigeant vers le point culminant de la Capitale du Hainaut, son Beffroi, le seul de style baroque, en Belgique, édifié de 1662 à 1669, haut de 87 mètres, classé, 330 ans plus tard, en 1999, au « Patrimoine mondial de l’UNESCO », son carillon, aux 49 cloches, nous rappelant que le savoir-faire des carillonneurs belges, figure, depuis 2014, sur la liste du « Patrimoine immatériel de l’UNESCO ».

A ses pieds, dans les « Jardins du Beffroi », nous découvrons cent agrandissements photographiques de clichéssignés Yann Arthus-Bertrandprésentés par séries de quatre, sur des cubes de grands formats.

Présent à Mons, aux côtés de son ami « Plantu » (Jean PlantureuxParis/1951), le renommé carricaturiste français, Yann Arthus-Bertrand nous confia, nous montrant une photo aérienne, prise au Yemen : « J’aime beaucoup cette photo de Sanaa, une des plus belles villes du monde. Aujourd’hui, les capitales, c’est du ciment, du béton. Là, c’est resté authentique. Je ne peux pas m’empêcher de penser que la France est le troisième vendeur d’armes au monde. On fabrique des armes qui passent par l’Arabie saoudite et qui bombardent ce pays »  (à ce sujet, notons que la Belgique, avec sa « Fabrique Nationale Herstal », est également souvent pointée du doigt/ndlr).

A l’opposé, Yann Arthus-Bertrand nous transmet un message d’espoir avec, photographié en Nouvelle Calédonieson célèbre « Coeur de Voh » (1990), une clairièreau milieu de la mangrove, qui fait la couverture de son ouvrage « La Terre vue du Ciel », édité en 1992 et réédité en 2017, par « La Martinière », ses différentes éditions cumulées ayant été vendues à plus de quatre millions d’exemplaires. Au sujet des superbes photos de son livreson auteur écrit : « Toutes les photographies sélectionnées ne sont pas des ‘natures mortes’, parce qu’elles montrent la vie. »

Lors de la visite de presse, à Mons, il nous confiait :  « Ce travail sur  ‘La Terre vue du ciel’ m’a complètement transformé. J’avais pris conscience, en partie, des problèmes de la Terre et d’une écologie assez basique, et j’en suis venu à une écologie où j’ai bien compris que l’espèce la plus en danger c’était l’espèce humaine. »

Concernant la présence de ses photos dans les « Jardins du Beffroi », il ajoutait : « C’est bien mieux d’exposer dehors, parce que d’abord c’est gratuit, et j’aime penser qu’il y a des jeunes, là, qui sont en train de pique-niquer au pied des photos. C’est ça qui m’intéresse. »

Sur la Grand’ Place, jouxtant l’Hôtel de Ville, la « Salle Saint-Georges » accueille l’exposition « LEGACY – l’Héritage que nous laissons à nos Enfants », une rétrospective de l’oeuvre, de 1981 aux années 2010, de Yann Arthus-Bertrand, incluant ses premières photos de lions - prises au Kénya, où il vécut, avec sa femme, Anne, durant 3 ans, au sein d'un village de l'ethnie Maasaï -, ainsi que ses clichés noir et blanc, moins connus - réalisés  pour l' "L’Express", du 13 mai 1993, publiés à l'occasion des 40 ans de cet hebdomadaire français -, présentant ses portraits intimistes de fermiers, réalisés lors de "Salons de l’Agriculture", en Argentine, en France et au Royaume-Uni, nous montrant le lien existant entre les paysans et leurs animaux.

« Moi qui suis parti au Kenya étudier les lions, ma conscience, c’était de sauver les éléphants et les rhinocéros, qui, aujourd’hui, sont en très mauvais état. A l’époque, les lions étaient 400.000, aujourd’hui ils sont 20.000.  Quand je suis né on était 2 milliards sur Terre, aujourd’hui on est 7 milliards. Quand nous voyons les chiffres, nous ne pouvons qu’être pessimistes. Ce qui se passe est extrêmement grave. Dans le même temps, je ne peux pas croire que l’homme n’ait pas ce ressort pour empêcher une sixième extinction », nous dit-il.

Pour en revenir aux photos des Français exposées dans la « Salle Saint-Georges », nous trouvons – outre des fermiers et leurs animaux, déjà cités, qui firent l’objet d’un ouvrage« Bestiaux », édité par « La Martinière » – un Présidentun couple d’acteurs pornoun cuisinier étoiléune mère célibataireun parent d’élève, … légendés de leurs âge, nom et profession, car, comme pour ses photos aériennes, il nous confie : « Sans information, les photos n’ont aucun intérêt. »

Des porcs d’élevage français aux lions du Kenya, en passant par un festival religieux sur le Gange, en Inde, voire par le Maroc et ses jolis tapisYann Arthus-Bertrand nous permet, depuis 40 ans, de nous rendre compte de ses tentatives pour défendre le monde agricole, la beauté naturelle et de la richesse culturelle de notre univers, tout en nous faisant prendre conscience des ravages que l’homme inflige à notre planète, ainsi que de l’héritage          (« legacy », en anglais, d’où le titre de cette expositionqui sera légué à nos futures générations.

Ce photographe mondialement reconnu est donc, également, un militant écologique de première ligne, qui débuta sa carrière professionnelle en devenant un pilote de montgolfière, découvrant ainsi l’importance fondamentale de la photographie aérienne, qui lui permit, dans un premier temps d’entamer une recherche pour expliquer le territoire des lions, bien avant la création (en 2005) - pour nous aider au « combat » à mener pour préserver notre environnement - de sa « Fondation Good Planet », sis au coeur du Bois de Boulogne, à Paris. Désormais, pour plus d’informations, nous pouvons, aussi, nous rendre au N°26, de la rue d’Edimbourg, à Ixelles, l’adresse de   « Good Planet Belgium » (Site web http://www.goodplanet.be/fr).

Ceci n’étant pas son but, notons néanmoins que Yann Arthus-Bertrand a reçu ses insignes d’ « Officier de l’Ordre du Mérite agricole », en 2003, d’ « Officier de l’Ordre national du Mérite », en 2008, d’ « Officier de la Légion d’Honneur », en 2009, et de « Commandeur de l’Ordre des Arts et des Lettres », en 2013. En outre, en 2006, il devient membre de l’ « Académie des Beaux-Arts », recevant, la même année, à Toulouse, la plus haute distinction décernée par les professionnels du miel, lors de la cérémonie « Les Abeilles d’0r », en récompense de son action en faveur du respect de la nature et des abeilles.

Pour ce photographe écologiste, il nous faut « répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité de nos générations futures de répondre aux leurs ». Soulgnons que cet engagement effectif dans la voie du  développement durable, ne dépend pas seulement des volontés des gouvernements, chacun ayant un rôle à jouer pour la planètechaque être humain ayant le devoir de se mobiliser pour influencer les décideurs.

Mais Yann Arthus-Bertrand tient à ajouter : « Tout ce que tu fais aujourd’hui, pour économiser du carbone n’aura d’effets que dans 20 ans. C’est loin 2040. Il faut vraiment une vraie volonté, une prise de conscience très forte pour le faire malgré tout ».

Pour « Paris-Match », à notre collègue Elodie Métral, il déclarait : « Bien sûr que ce n’est pas en prenant une douche au lieu de prendre un bain qui va changer grand-chose, on a bien compris que c’était beaucoup plus grave que ça aujourd’hui, mais au moins, commençons par le basique. On est quand même huit milliards d’habitants sur Terre, si on est quelques milliards à faire le basique, on change le monde... Ce que j’aimerais, c’est que le changement se fasse sous la pression du bon sens, et pas sous la pression de l’obligation. »

Evoquant les incendies en Amazonie, au Brésil, il y a un an, il confiait à Frédéric Mouchon, notre collègue du quotidien français « Le Parisien », au moment où, en 48h, près de 2.500 nouveaux départs de feu venaient d’être constatés : « Chaque année, la déforestation détruit sur la planète des forêts primaires de la taille de la Belgique, tout ça pour produire de l’huile de palme ou du soja destiné à nourrir nos animaux d’élevage et à fabriquer de la viande industrielle. Beaucoup de ces feux sont provoqués par des paysans pauvres, à qui on demande de fournir ces matières premières. Mais ces feux, en Amazonie, ne sont au fond que le reflet de nos vies… Pour nourrir notre bétail, les coopératives françaises importent du soja produit au Brésil et issu de la déforestation… »

Ce mercredi 26 août 2020, l’ « IPAM » (« Institut amazonien pour la Recherche environnementale »), l’ « IEPS » (« Institut d’Etudes pour les Politiques de Santé » ) et « Human Rights Watch » publiaient un rapport commun déclarant qu’en 2019, 2.195 hospitalisations pour maladies respiratoires avaient été attribuées à ces incendies, près de 500 concernant des nourrissonsde moins d’un an, et plus de 1.000 impliquant des seniors de plus 60 anscette déforestation brésilienne incontrôlée augmentant considérablementempoisonnant l’air que des millions de personnes respirentaffectant la santé dans toute cette région, confirmant ainsi les inquiétudes  de Yann Arthus-Bertrand.

A ceux parmi nous qui se décident à se rendre aux « Jardins du Beffroi » et à la « Salle Saint-Georges », il écrit :  « Chacune de ces images raconte une histoire qui va bien au-delà d’une fraction de seconde. Grâce à ces expositions, je souhaite partager et poursuivre avec vous ce dialogue avec le monde. Regardez les photographies, tout en prenant le temps de lire les légendes, de vous interroger sur les histoires derrière ces images, de comprendre les enjeux écologiquessociaux et humanistes. Et pourquoi ne pas poursuivre ce dialogue autour de vous ? »

Assurément, ces deux expositions nous proposent une lecture des grandes transformations du mondede ses habitantsanimauxminéraux et végétaux, nous incitant à penser à ce que nous allons transmettre aux plus jeunes.

Ce concernant, Yann Arthus-Bertrand a écrit : « En 2017, la ‘FAO’  (« Food and Agriculture Organization of the United Nations »/ndlr) estimait que quelques 17% (soit 1.548) des races  d’animaux d’élevage étaient menacées d’extinction. Aujourd’hui, des millions de bovins et de porcins naissent à partir des gènes d’une centaine d’animaux seulement, et 5 races dominent l’élevage mondial. Cette double érosion, génétique et patrimoniale, est principalement dûe au croisement des races autochtones avec des races dites plus ‘productives’, mais souvent bien moins adaptées au territoire. Cette diversité génétique constitue, pourtant, une condition essentielle de l’adaptation face aux enjeux futurs tels que : le changement climatique, les maladies émergentes, la pression exercée sur les terres et les eaux et l’évolution des demandes du marché. La difficulté, c’est que nous sommes notre propre ennemi. C’est difficile de consommer moins, de vivre d’une façon différente. »

A la question de notre collègue Vincent Olivierpour « L’Express » : « Ne risquez-vous pas, en quelque sorte, d’esthétiser la déforestation, l’urbanisation ? », il répondit : « Je l’avoue, j’aime cadrer, j’aime les ‘belles images’… et, de toute façon, je ne sais pas faire moche ! Enfin, la beauté est universelle. Vous savez, la mer que l’on vide de ses poissons reste bleue, le ciel qui se charge de CO2 ne change pas non plus de couleur. »

Le plus important, au delà de ses « belles images », n’oublions donc pas le message de Yann Arthus-Bertrand :   « Le changement climatique et la disparition de la biodiversité nous concernent toutes et tous. Ces 2 phénomènes, et d’autres, mettent en péril la survie de l’espèce humaine, donc la nôtre et celles de nos descendants. Le temps pour réagir et y faire face est court. Il n’y a pas de guide universel, mais tout le monde peut apporter sa contribution à la préservation de la planète. »

Ouverture des deux expositions jusqu’au dimanche 25 octobre, du mardi au dimanche, de 12h à 18h. Prix d’entrée : 6 € (4 €, en prix réduit), pour la « Salle Saint-Georges »incluant un Guide du Visiteur de 34 pages. Libre accès, pour tous, aux « Jardins du Beffroi », mais nécessité d’être détenteur d’un ticket d’entrée, pouvant être obtenu via le site web : http://www.visitmons.be, la jauge extérieure étant limitée à 300 visiteurs par heure. Réductions pour d’autres lieux montois : 3 €, par personne, sur présention du ticket, pour l’entrée aux   « Beffroi »« Musée du Doudou » ou "Site Silex's"Site web du photographe :  http://www.yannarthusbertrand.orgCatalogue broché/richement illustré/26 €. Port du masque obligatoire  et respect de la distanciation physique d’1m50entre les personnes ou les « bulles sociales ».

En ce qui concerne la Ville de Mons, pour le BourgmestreNicolas Martin, ces deux expositions, destinées à un large public, s’inscrivent dans sa politique urbaine, soucieux qu’il est de redynamiser le Centre-Ville, en prenant la Culture comme vecteur de développement économique, avec, ici, un message éducatif particulier, mettant en avant les grands problèmes de notre société.

Notons qu’en dehors du contenu de ces deux expositions, Yann Arthus-Bertrand, s’intéressant, aussi, aux sports, a signé plusieurs ouvrages sur le tennis, au tournoi de Roland Garos, suivant, durant dix ans, le rallye automoblie « Paris Dakar », pour « Paris-Match »

Enfin, pour l’anectote, il est à noter que ce grand photographe écologiste, fut, aussi, en 1965, l’interprête du rôle de « Galland », dans le film « Dis moi qui tuer » (Etienne Périer/Fra./85’/avec Michèle MorganChristian Marin, Danio Moreno et Jean Yanne).

Par ailleurs, dans le confort de nos domiciles, nous pouvons regarder l’un de ses films, « Human », d’une durée de… 3h08′, via le lien : https://www.youtube.com/watch?v=b_bCtOm2J1U.

Profitons de notre présence à Mons, pour (re)découvrir – au début de la rue de Nimy, venant de la Grand’ Place, à moins de 300m du « Théâtre Royal » – « Passenger », l’oeuvre éphémère d’Arne Quinze, qui, réalisée, en 2015, à l’occasion de « Mons, Capitale européenne de la Culture », sera démontée en septembre.

Deux cent mètres plus bas, à l’angle des rue Verte et de Nimy nous découvrons deux fenêtres aveugles, surperbement mises en valeur par « Jana et JS » (« JS » étant les initiales de Jean-Sébastien), ce dernier et Jana, constituant un duo d’artistescouple français dans la viedomicilié à Salzburg, en Autriche.

En visite à Mons, promenons-nous dans d’autres rues, afin de découvrir les nombreuses peintures murales, dont les 17 réalisées cette année, dans le cadre de « L’Art habite en Ville », un plan étant disponible, au prix d’ 1 €, à l’ « Office de Tourisme-Visit Mons », situé sur la Grand’ Place, ouvert 7 jours sur 7, de 09h30 à 17h30 :  065/33.55.80 ou info.tourisme@ville.mons.be.

Yves Calbert.

 

  • Rivière près de Maelifellssandur/région du Myrdalsjökull/Islande © Yann Arthus-Bertrand
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